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7 novembre 2006

beigbedder

Interview réalisée par Sylvain Monier début mars 2000 :

Frédéric Beigbeder :
« Tout est provisoire sauf moi… »

(chapô). Il a l’air snob, frivole et dilettante. Pourtant Frédéric Beigbeder multiplie les activités. Critique littéraire pour Voici Lire et Rive droite rive gauche, concepteur-rédacteur pour des agences de publicité, chroniqueur mondain pour la presse magazine…. A 35 ans et bientôt 5 livres au compteur, ce dandy un brin cuistre qui mélange subtilement arrogance et autodénigrement passe pour beaucoup, comme le meilleur écrivain de sa génération. Frédéric Beigbeder ou la fausse futilité.  (fin chapô)
Sur quel livre travaillez-vous en ce moment ?
Frédéric Beigbeder : Je travaille actuellement sur mon prochain roman qui paraîtra à la rentrée. Ça va s’appeler « 99 F. ». C’est un livre qui retrace mon expérience dans monde de la publicité. Il me reste à faire le début et la fin. Cela fait une semaine que je suis dessus, et j’ai un peu de mal à me concentrer… Je suis capable de refaire vingt fois la même phrase. Pour couronner le tout, j’ai tendance à pas mal boire quand j’écris. Du coup, je suis un peu fatigué.
Quel est la première phrase de votre roman ?
« Tout est provisoire ».
Et la dernière ?
Je ne sais pas trop encore. Peut être « Tout est provisoire, sauf moi. »
Vous considérez-vous comme un écrivain ?
Je ne me permettrai pas de dire cela. Je pense être surtout un témoin de mon époque.
Votre roman sort chez Grasset en septembre, vous visez les prix littéraires ?
Mon éditeur aimerait beaucoup. Mais comme j’ai flingué la plupart des membres des jurys sauf François Nourrissier, dans Voici ou à la télé à mon avis ça va être très compromis. De toute façon, les prix littéraires récompensent toujours de mauvais livres à part peut être Jean Echenoz l’année dernière ou le mien l’année prochaine. A part cela ils ont quand même raté Céline en 1932, et ils se sont ridiculisés en ignorant Michel Houellbecq en 1998. Mais s’ils me donnent un prix, je serai le premier à chanter leurs louanges.

Dans votre premier roman « Journal d’un jeune homme dérangé », vous vous présentez comme quelqu’un de volontairement futile et noceur…
A l’époque je me prenais pour Antoine Blondin, mon écrivain préféré. Je faisais beaucoup de jeux de mots. Et en plus j’écrivais ce livre enfermé dans les locaux des éditions de la Table ronde. Ce livre retrace l’époque où à Sciences po, j’avais crée le « caca’s club » avec des amis. On organisait beaucoup de soirées et c’est vrai qu’on s’amusait énormément. Plus particulièrement, ce roman décrit les grandes difficultés d’un fêtard amoureux,  qui choisit la nuit plutôt qu’une vie de famille toute tracée.

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Vous enfoncez le clou avec votre deuxième livre « Vacances dans le coma », dont l’action se situe entièrement dans une boîte de nuit…
Je voulais écrire quelque chose d’expérimental. Un récit qui commence à 7h du soir dans une boîte et qui se termine à 7 h du matin dans le même endroit. A l’époque j’étais chroniqueurs mondains pour des magazines comme Vogue ou Cosmo. J’ai écrit ce livre pour me débarrasser de la nuit et de mon image de fêtard superficiel et impertinent.
La fête, c’est quelque chose d’important pour vous ?
Absolument. C’est pendant un fête que l’on rencontre la plupart du temps la femme de sa vie. La première cuite, la première prise de drogue des épisodes de la vie d’un homme que je considère comme importants  se font pendant des fêtes. On y vit des joies naturelles ou artificielles certes mais des joies quand même. Je n’ai absolument pas honte de ce passé. Contrairement à mes parents ou mes grands parents je n’ai pas vécu de guerres ou de mai 68. Ma génération est assez gâtée. La seule guerre que j’ai vécu c’est celle de la cocaïne. Comme le dit l’écrivain Jay Mc Inerney « We have been throug the cocaïne war… » (nous avons traversé la guerre de la cocaïne).
Cette image de mondain vous a gêné?
Ce qui me gêne, c’est entendre dire qu’un mondain ne peut pas être écrivain. Pourtant Proust, Stendhal, Cocteau ou Scott Fitzgerald étaient de grands mondains. Par ailleurs j’ai horreur des gens qui prennent des poses d’écrivains tortutés comme Christine Angot par exemple. Ceux-là je les laisse à Libération et consorts…
Avez-vous changé depuis ?

Forcément, en dix ans je me suis marié et j’ai eu un enfant…
 

Dans votre troisième roman, « L’amour dure trois ans », vous racontez de façon assez impudique votre rupture sentimentale. Est-ce que c’était dur à relater ?
Les deux premiers romans m’ont permis de me débarrasser du monde de la nuit. Avec « L’amour dure trois ans », je voulais évacuer mon divorce. Cette impudeur permettait de toucher des gens qui avait vécu la même expérience. Un divorce c’est toujours un échec assez douloureux. Quand je me suis marié, j’étais parti pour faire comme mon père : l’ENA, un bon mariage… Bref devenir un notable. Au lieu de cela je me suis lancé dans des activités que mes parents considéraient comme « pas sérieuses ». Pourtant chroniqueur mondain, c’est vachement sérieux comme métier ! Ecrire les légendes de photos de célébrités c’est très fatigant, il faut pas se planter ! Plus sérieusement, ce livre c’était un peu une auto-analyse pour mieux repartir et changer de direction à ma vie.

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En tant que chroniqueur littéraire vous avez souvent la dent dure. Or vous écrivez également des livres. Vous ne trouvez pas que cette attitude soit contradictoire ?
Pas du tout. Tous les écrivains ont été un jour chroniqueurs littéraires. La littérature est un art en danger. Ce monde ne concerne que 1000 personnes. Alors on s’aime on se déteste, on le fait savoir par des livres ou des articles… Je trouve cela très sain au contraire. Cela donne de la vie à un art qui devient moribond. Je déteste les renvois d’ascenseurs. Il faut dénicher et dénoncer les imposteurs. Philippe Labro n’est pas un écrivain. Et pourtant on a pu voir bon nombre d’articles élogieux sur sa dernière « œuvre » dans la presse. C’est ce genre de comportement qui tue la littérature, pas le mien.

Vous devez avoir pas mal d’ennemis dans le milieu ?
Pas tellement dans le milieu littéraire. Par contre chez les journalistes qui se prennent pour des écrivains certainement. Daniel Rondeau de L’Express a écrit un bouquin pathétique sur Johnny. Je me suis moqué de lui et ce monsieur a menacé de me casser la figure. Pareil pour Alain Rémond. J’ai éreinté sa nunucherie à la poêle au « Masque et la plume ». A mon avis, je vais me faire descendre dans  Télérama quand mon prochain roman sortira . Mais je m’en fiche. Au contraire, c’est un honneur de se faire éreinter dans Télérama !

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